De retour d'un voyage au Venezuela, je me dis qu'il faut sauver la terre si l'on veut qu'elle nous sauve. Beaucoup s'occupent déjà du cacao. L'idée était donc de sauver un part de végétal et d'agriculture, aider un secteur en perdition. C'est le cas de l'amande française. Nous consommons beaucoup d'amandes et les meilleures sont les françaises, non pas parce qu'elles sont françaises mais parce que c'est mon goût. J’ai donc repris une plantation d'amandiers dans le Sud de la France. Nous y cultivons cinq variétés d'amandes qui apportent chacune quelque chose de particulier à nos créations.
Il y avait dans la propriété des vignes abandonnées. Il était inconcevable de les arracher et une rencontre improbable avec un vigneronne, archéologue de formation, a fait naître notre aventure viticole. Aliette, notre viticultrice, qui possède également son propre domaine, travaille nos raisins selon ma direction gustative. C'est un exercice assez compliqué que de transmettre un goût. Ensuite elle nous conseille sur la façon de faire. C’est un travail collaboratif.
Nous produisons trois cuvées dont une en amphore qui est vraiment particulière et ne ressemble à aucune autre. D'ailleurs, le hasard fait que la trame aromatique a des ressemblances avec celle de notre chocolat. En revanche ce n'est absolument pas un vin à déguster exclusivement avec le chocolat, il se suffit à lui-même.
Mon rôle de chocolatier-créateur et de producteur est un tout inséparable, il faut créer pour produire et produire pour créer encore. Même s’il est difficile d’être producteur aujourd’hui en France. Ce n'est pas viable économiquement si l'on veut s'installer, ici c'est du mécénat !
Mais la passion ne s'explique pas, elle se vit.
Mon exigence ? Allier des matières premières nobles et un résultat artistique en boutique : Les matières ne sont qu'un des éléments. Le process et la vision sont tout aussi importants. Mais on ne fait rien de bon sans de bonnes matières premières, c'est juste le début du chemin pour transmettre des émotions. Les boutiques, c'est identique, elles mettent en valeur le produit et l'expérience client que l'on veut transmettre. La boutique est la structure. Chacune est différente pour que chaque visite soit un moment privilégié, une expérience sensorielle mêlant olfactif, vue, toucher, ouïe... Le bon et le beau.
L’amour du bon produit est pour moi une évidence. Bien manger c'est juste normal, du moins- ça devrait l'être. Ce sont beaucoup de souvenir d'enfance : les pêches de ma mère c'est 364 jours d’amour et tu peux tout détruire avec un coup de mixeur de trop, ça me rend juste hystérique de ne pas respecter la matière première, les hommes et les femmes qui l'ont produit, le végétal et la nature qui nous donnent tout.
Nous faisons confiance à des fournisseurs, producteurs qui partagent notre amour de l'excellence et comprennent notre exigence, celui de notre goût. Ni bon, ni mauvais c'est le goût Patrick Roger, celui qui me correspond. Nous pouvons juste maîtriser le process,
l'aval et encore ! Il faut une pointe de génie et surtout beaucoup de travail pour arriver au résultat escompté.
On peut ensuite maîtriser en boutique puis c'est la confiance au client qu'il faut transmettre, qu'il prenne soin du produit, de tout le travail qui a été mis dedans, alors il se révèlera (le produit et peut être même le client) et s'offrira sous ses meilleurs atouts